80 ans : Première embauche chez Marcel Barbu

midy Par Le 11/06/2021 à 18:31 0

 

La première embauche à l'entreprise de Boitiers de Montres du Dauphiné a eu lieu en juin 1941 et le plus simple pour comprendre l’histoire est de laisser la parole à Robert Brozille :

Y a déjà plus de trois semaines que j'ai quitté l'Armée.

De retour à VALENCE où j'ai toute ma famille, je cherche un emploi dans les Usines de mécanique de la région. C'est en vain que j'ai visité CROUZET - TOUSSAINT - FAURE PLOUTON, et tant d'autres. Mais j'entends toujours la même réponse : Revenez plus tard, en ce moment il n'y a pas de travail. La mine de mes interlocuteurs ne me laisse que peu d'espoir sur ce "Revenez plus tard".

J'ai retrouvé quelques-uns de mes copains d'apprentissage qui ont échappé au désastre de Juin 40 et comme moi cherchent un employeur. C'est aussi décevant pour eux et tous n'ont pas la chance d'avoir un père employé au P.L.M. pour pouvoir attendre.

Certains ont accepté des tâches qui n'ont rien à voir avec leur qualification : travaux de terrassement, goudronnage, etc... Mais il faut tenir car il n'y a pas d'assurance chômage.

Par chance, un voisin serrurier m'indique qu'une usine est en train de s'installer au 41 de la rue Montplaisir.

Entreprise BoimondauJe me précipite, et je découvre cette bâtisse en forme de villa dont le pignon fait face à un jardin potager agrémenté d'une jolie treille.

L'entrée est sur le côté du jardin, avec un modeste portillon de bois.

C'est dans ce décor champêtre que je suis reçu par un couple jeune, environ 35 ans.

Je suis surpris par la tenue de ce que je crois être le patron : pantalon court et chemise bleue, large béret incliné sur l'oreille. C'est la tenue des Compagnons de France Compagnons de France. Madame est enveloppée dans une blouse gris-bleu, serrée par une ceinture.

Ce sont Monsieur et Madame Barbu.

Nous avons beaucoup parlé à l'ombre de la treille, ou plutôt, j'ai entendu beaucoup de choses, car Monsieur Barbu parle plus qu'il n’écoute... tandis que Madame Barbu, discrètement, m'étudie sur toutes les coutures.

Mon histoire est simple : l'école, l'apprentissage, l'Armée, et rescapé du désastre de 1940 je cherche du travail.

Mais pour moi qui viens d'être débarrassé de la tenue militaire, l'uniforme des Compagnons de France m'incite à la plus grande réserve. Pourtant l'homme est passionnant à écouter, son langage simple, direct et convaincant. Il a des projets plein la tête : finie la lutte des classes Propreté, Ordre, Esprit d'équipe sont des mots que l'on n'a pas souvent l'occasion d'entendre de la part d'un patron.

Mais peu m'importe ce que j'ai entendu ce jour-là de toutes ces idées généreuses.

La seule qui m'intéresse « Je suis embauché à l'essai ».

En cet après-midi du 16 Juin 1941, j'ai quelques scrupules à reporter au lendemain mon entrée en fonction.

Pour bien faire, il faudrait que je commence tout de suite.

Je n'ai pas encore le virus. Ça viendra plus tard !

Robert Brozille a beaucoup écrit de nombreux articles dans le bulletin le Lien et plus tard, dans le bulletin de liaison de l’association des anciens.  

Jacques Bergez, né à Besançon, résistant, arrêté à 17ans et déporté. Il habitait à Besançon en 1940 avec sa mère et ses jeunes frères et sœurs :

« J’avais 14 ans et demi en juin 1940.

On dit que l’armée allemande est aux portes de la ville. Les appartements du quartier sont silencieux : dans un triangle avec rue Pierre Leroy, la rue Félix Vielle et la rue Labbé, il y avait 3 maisons - Habitations Bon Marché (HBM) construites en 1933, sur les 24 appartements, nous restons les derniers.

Le 15 juin, ma mère ferme la porte de notre appartement au 1 rue Pierre Leroy, à quelques pas de l’école d’horlogerie. Nous portons chacun deux valises, plus petites pour mon frère et ma sœur. Péniblement, nous nous frayons un passage dans le flot ininterrompu de femmes, d’enfants, de vieillards et de militaires en retraite venant de Belfort, Vesoul et Gray, et nous prenons la direction de la gare Viotte.

Sur la première voie, un train attend pour partir. Nous parvenons à trouver quatre places. Nous hissons les bagages et attendons le départ. Après deux à trois heures, tenaillés par la faim et la soif, ma mère décide de retourner à l’appartement.

Retour à l’appartement. Les volets restent fermés. Les valises sont défaites. Maintenant il va falloir vivre :

« On lui a dit et répété qu’il ne fallait pas faire de réserves de provisions, en tant que femme d’officier, elle devait être exemplaire ».

Mais maintenant comment vivre ?

Par une fente dans les volets, je vois arriver les Allemands, une brève fusillade éclate avenue Charles Siffert. Surtout ne pas bouger et attendre.

Le lendemain, comme d’autres, je m’aventure et je vois 4 à 5 corps de militaires français le long de la société des Compteurs.

Dans la ville c’est le désordre, la population est abandonnée. Il n’y a plus de responsables, ils ont déserté.

Marcel Barbu a pris les choses en mains, de sa seule initiative.

Il s’est déjà occupé des cadavres que personne ne voulait approcher.

Puis il s’est attelé au ravitaillement. Et il s’est imposé pour faire régner l’ordre.

Il s’est occupé de tout, même des prisonniers français à la caserne Vauban, je voyais bien ce qui se passait, la caserne est proche d’où nous habitions.

Après avoir consommé le peu que nous avions, ma mère a pris contact avec Marcel Barbu dont la famille habitait le même quartier. Si nous avons pu avoir à manger, c’est grâce à l’action de Marcel Barbu.

En 1965, lors de sa candidature aux élections présidentielles, je n’étais pas toujours d’accord sur ce que disaient des journalistes. Je me suis permis d’écrire à l’un d’eux. Ils ne connaissaient pas l’homme, ce qu’il avait fait.

Pour ma mère, Marcel Barbu reste un homme extraordinaire. »

Les naufragés du Saint-dDidier1200 militaires se préparent pour aller en renforts en Syrie où l’armée de Vichy est attaquée par les anglais et l’armée de la France Libre.

Départ en train, voyage à travers l’Europe, embarquement du matériel et de 250 hommes sur le Saint-Didier, direction de la Syrie.

Au large des côtes de la Turquie, le bateau est coulé par les Anglais. Les militaires recueillis, ils sont internés pendant 6 mois en Turquie.

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