Étoile-sur-Rhône 39-45

Découvertes macabres dans le parc du château

Albert Bébert RÉMY

 

Albert RÉMY 

Le dimanche 9 juillet 1944, comme tous les dimanches, il met sa tenue de ville et se rend à pied au village à une distance de 7 km. Mais cette fois, ce n’est pas seulement pour rencontrer des amis au café, c’est aussi pour faire la distribution de quelques tracts parachutés la veille pour le maquis.

Albert Bébert Rémy est né le 2 octobre 1921 à Lyon 2ème arrondissement. Ses parents décèdent en 1933, Albert à 12 ans et son frère Jacques à 11 ans. Leur Grand-oncle Claude François Albert Benoit (frère de leur Grand-mère paternelle) devient leur tuteur.
Pour échapper au STO (Service Travail Obligatoire), il trouve un emploi chez Auguste Grégoire à Étoile.

L’unité allemande installée au château de La Paillasse contrôle les allées et venues sur la nationale 7 et ceux qui n’ont pas de papiers en règle sont emmenés aussitôt au château et peu en ressortent.

Quelque temps après la libération du village, André Robin et Gabriel Chazel creusent un trou dans le parc du château de La Paillasse pour enfouir un cheval et là quelle ne fut pas leur surprise de trouver deux corps de jeunes gens dans des tranchées récemment comblées. Les recherches permirent rapidement de trouver leurs identités : Raymond Fusy, né le 3 mai 1927 à Chalamont (Ain), et Daniel André Fragnol, né le 17 février 1914 à Margès (Drôme) tous deux habitant à Saint-Donat-sur-Herbasse.

Jacques Rémy, jeune frère d’Albert, effectue depuis plusieurs mois des recherches pour retrouver son frère, sans résultat. La découverte des deux corps dans le château de La Paillasse laisse à penser que d’autres corps peuvent y être ensevelis.

Le 13 février, la gendarmerie de Livron est mandatée par le procureur de la République pour effectuer une enquête.

Deux gendarmes recueillent le témoignage d’Auguste Grégoire, agriculteur à la Poulate (quartier Étoile) : depuis 3 ans, j’avais à mon service en qualité d’ouvrier agricole, le nommé Albert Rémy, natif de Nantua (Ain).

 
Le 9 juillet 1944, Albert est parti de mon domicile pour se rendre à Étoile, afin de distribuer des tracts alliés parachutés la veille dans les environs. Ce même jour, vers 13 heures, j’ai été prévenu par le domestique de M. Debos, que si Albert n’était pas rentré chez moi pour déjeuner, c’est qu’il avait été arrêté par les Allemands dans le village.
En raison des évènements et étant moi-même considéré comme suspect, je n’ai pas effectué de recherches immédiatement en vue de retrouver les traces de mon domestique.
Pas mal de civils Français, ayant été fusillés par les Allemands dans le parc du Château de M. Tézier à La Paillasse.
J’ai demandé à la libération si par hasard mon domestique n’aurait pas été fusillé ou déporté par les Allemands lors de son arrestation.
Au mois d’août 1944, sans pouvoir préciser la date exacte, j’ai reçu de M. Albert Benoit, de Saint-Martin-de-Fresne (Ain), grand-oncle et tuteur de mon domestique, une lettre me demande de ses nouvelles, attendu qu’il n’en avait pas reçu depuis très longtemps. J’ai répondu à M. Benoit, que son petit-neveu avait été arrêté à Étoile, le 9 juillet 1944 par les Allemands, alors qu’il distribuait des tracts alliés.

Le 15 janvier 1945, M. Benoit m’a écrit à nouveau pour me demander si j’étais toujours sans nouvelles de son neveu. J’ai fait réponse à sa lettre, en lui faisant connaitre que j’étais sans nouvelles de mon domestique Albert et que pour effectuer les recherches, il devait s’adresser à M. le Procureur de la République de Valence.
Le 8 février 1945, le frère de mon domestique actuellement aux armées et se trouvant de passage à Valence, est venu me trouver chez moi, et de là c’est rendu à la mairie d’Étoile, ou en accord avec la municipalité il a été décidé que des recherches seraient entreprises le 13 février 1945, dans le parc du château de M. Tézier où son frère avait été conduit le jour de son arrestation.

Jacques, frère d’Albert, a 22 ans, caporal au parc de Campagne N° 1, au palais de la foire à Lyon.

Jacques : Le 13 février courant, comme il avait été convenu le 8 avec la municipalité d’Étoile, je me suis rendu dans le parc du château de La paillasse, où, en présence de M. André Valette, garde champêtre, d’Auguste Grégoire, patron de mon frère, de Louis Marquet, ancien fossoyeur de la commune. Les recherches ont été entreprises dans les tranchées comblées par les Allemands. À la première fosse suspecte, sous une épaisseur de 50 cm environ de terre, le corps d’un homme a été mis à jour. Par la chevelure et la constitution du crâne, j’ai formellement reconnu mon frère Albert.

Auguste Grégoire confirme que le corps qui vient d’être découvert dans le parc du Château de La Paillasse : Je le reconnais formellement par sa veste, son pantalon, ses chaussettes en laine, sa cravate et sa dentition, pour être celui de mon domestique Albert qui avait été arrêté par les Allemands le 9 juillet. Je peux dire qu’il a été dépouillé de  ses chaussures anglaises parachutées pour le maquis.

Le même jour, le Procureur de la République de Valence demande que soit prescrit un certificat médical constatant la mort d’Albert Rémy, c’est ce que fait le Docteur Burger d’Étoile après examen du cadavre.

Le médecin constate que le décès d’Albert est dû d’une balle d’arme à feu dans la région occipitale ainsi qu’une fracture du crâne due à un coup violent.

La semaine suivante, le Maire Paul Verd, décide, sur les indications d’André Robin et Gabriel Chazel, d’entreprendre la fouille complète du parc du château de La Paillasse. Il n’y eut aucune autre découverte.


Albert RÉMYLe 16 janvier 2017, Michel Chaudy dépose un dossier à l’Office Nationale des Anciens Combattants et Victimes Guerre pour la reconnaissance de la mention « Mort pour la France » à Albert Rémy.
Mention attribuée le 13 avril 2017. Le nom d’Albert Rémy est rajouté sur la plaque du monument aux morts.

Date de dernière mise à jour : 17/11/2023

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